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« Dette sociale » : de quoi parle-t-on ? - CADTM

N’en déplaise aux militant·es du CADTM, force est de reconnaître que le concept de dette sociale n’est pas un concept très parlant. Et, ne nous facilitant pas la tâche, il semblerait bien que ce soit un concept polysémique, dont les différents sens ou du moins acceptions politiques peuvent même s’avérer antagonistes. Comment s’y retrouver ? De quoi parle-t-on lorsque l’on évoque la dette sociale ? Ou plutôt qui parle de quoi ?


Sommaire

1- Les dettes des organismes de protection sociale

2- Qui doit à qui ? Le sens de la dette sociale comme enjeu politique

3- La dette sociale : une dette avant tout féministe

4- Des droits sociaux à la dette sociale, de l’usager au débiteur5- La dette sociale, comme fondement de la société


Extrait

Dans son ouvrage « La fabrique de l’homme endetté. Essai sur la condition néolibérale » [24], Maurizio Lazzarato démontre en quoi le système économique néolibéral produit une subjectivité spécifique chez les individus : celle de l’homme (sic) endetté. La relation créancier/débiteur considérée comme le fondement du lien social (asymétrique) dans le système capitaliste néolibéral va agir comme un dispositif de pouvoir, de contrôle permettant pour reproduire les relations d’exploitation propres au capitalisme néolibéral [25]. Autrement dit, contribuer à fabriquer des hommes endettés (et qui se pensent comme tels) va permettre au capital de se maintenir en les obligeant à travailler pour lui, selon ses conditions.


Une des illustrations (parmi d’autres) de ce processus de contrôle et de production de la subjectivité inhérente au néolibéralisme est la transformation des droits sociaux en dette sociale et dans son sillon de l’usager en débiteur. Au terme de ce (long) processus les travailleur·euses ayant lutté pour bénéficier de droits de protection sociale collectifs, universels et inconditionnels deviennent les débiteur·ices d’une dette sociale individualisée [26]. Le remboursement de cette dette sociale ne se fait pas en monnaie, mais via « l’adoption de comportements conformes » visant à améliorer son employabilité, sa disponibilité et son insertion [27]. À l’image de la relation financière entre une banque et sa clientèle ayant contracté un crédit, l’État providence exige de la personne débitrice de rendre des comptes : nombre de candidatures mensuelles pour un emploi, justification de l’utilisation de son temps, relevés de compteur ou de compte bancaire, vie de couple, déplacements… Tel un huissier, l’État s’immisce dans la vie intime des « bénéficiaires » de droits sociaux, y compris physiquement, comme en témoigne par exemple les visites domiciliaires [28].


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