Avec la pandémie de Covid-19, l’emploi connaît en France une crise sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. Mais aux inégalités face à l’emploi s’ajoutent des inégalités de conditions de travail que la pandémie a révélées et amplifiées : les cadres, davantage épargnés par la crise, ont massivement télétravaillé, tandis que les ouvriers et les employés – à l’arrêt pour près de la moitié – sont quasiment toujours sur site quand ils sont en activité.
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Parmi l’ensemble des actifs qui occupaient un emploi au 1er mars 2020, 30 % étaient à l’arrêt deux mois après et 70 % travaillaient encore – dont 41 % depuis leur domicile et 59 % à l’extérieur.
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La protection du diplôme
Que ce soit en termes d’emploi ou de conditions de travail, les cadres apparaissent davantage épargnés par la crise que toutes les autres catégories sociales. 86 % d’entre eux poursuivaient leur activité professionnelle lors de la 7e semaine de confinement (moment de l’enquête), dont les deux tiers en télétravail.
Si les professions intermédiaires continuent massivement à travailler (80 % d’entre elles), elles exercent plus souvent leur activité à l’extérieur du domicile (48 %). Les employés et les ouvriers apparaissent quant à eux les plus touchés par la crise : ils sont 42 % et 43 % à ne plus travailler début mai 2020.
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C’est pour les femmes que la situation s’est le plus nettement détériorée. Parmi celles qui étaient en emploi au 1er mars 2020, deux sur trois seulement continuent de travailler deux mois plus tard, contre trois hommes sur quatre. Quand elles sont en emploi, les femmes sont autant en télétravail que les hommes (figure 1), mais leurs conditions diffèrent.
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Pression résidentielle
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Plus souvent entourées d’enfants (48 % des femmes en télétravail vivent avec un ou plusieurs enfants au moment du confinement, contre 37 % des hommes), les femmes disposent moins souvent d’une pièce à elles. En moyenne, un quart des femmes télétravaillent dans une pièce dédiée où elles peuvent s’isoler contre 41 % des hommes.
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Les relations intrafamiliales déséquilibrées
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La surcharge domestique liée aux nouvelles formes de télétravail, qui se surajoute au travail scolaire des enfants, semble ainsi changer la donne quant au niveau de bien-être des différentes catégories de population.
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La fin de 50 ans de réduction des inégalités
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Au bilan, l’emploi s’est rétracté fortement en France deux mois après le début de la pandémie de Covid-19, affectant en premier lieu les moins diplômés et les précaires, comme à chaque grande récession dans l’Histoire. Apparu sous une forme nouvelle, le télétravail en continu se développe massivement pour les cadres, sans que le logement ne soit toujours adapté.
Mais c’est pour les femmes que la situation se dégrade le plus. La pandémie et la crise économique qu’elle a engendrée accentuent les écarts avec les hommes, après un demi-siècle de réduction des inégalités entre les sexes.
La pandémie de Covid-19 révèle donc – en même temps qu’elle les accentue – les profonds clivages qui traversent la société française en matière d’emploi comme de conditions de travail. Taux d’emploi, lieu de travail et exposition au risque sanitaire, conditions de télétravail : les indicateurs se dégradent et les écarts se creusent entre les classes sociales et les sexes.
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