Ce nouvel opus de Ken Loach est un réquisitoire implacable contre la machine à détruire la dignité des travailleurs qu’est le capitaliste boosté aux amphétamines de l’économie numérique. Il doit nous amener à tourner le dos définitivement au mirage de l’économie digitale de type Uber et Amazon en boycottant ces modes de consommation. Mais surtout il nous amène à comprendre mieux que n’importe quel ouvrage théorique ce que signifie la mythe de la fin du salariat : à savoir la destruction de l’ensemble des garanties sociales, juridiques et collectives qui participent de la dignité des travailleurs pour mieux leur substituer des contrats léonins, précaires et inhumains qui transforment les travailleurs en marchandises interchangeables attirés par le mirage du petit entrepreneuriat libéré du joug (totalement illusoire) du salariat. Et nous voyons de manière limpide le visage cru du projet macroniste qui se profile : saborder le droit des travailleurs au profit d’une relation contractuelle de travail négociée de gré à gré avec un donneur d’ordre qui n’est rien d’autre qu’un employeur déguisé libéré de toute responsabilité sociale à l’égard de la classe des travailleurs. Dit autrement, mieux que l’exploitation du salarié par un patron employeur, le capitalisme néo-libérale nous vend dorénavant le modèle de l’auto-exploitation, de la sous-traitance entre travailleurs eux-mêmes et la fin de toute protection sociale des travailleurs. Sorry We missed You est un film qui nous bouscule de manière salutaire et doit être vu impérativement. C’est en outre un support militant de première importance que l’ensemble des militants attachés au projet de République sociale doivent utiliser pour mieux faire comprendre les dangers gravissimes de la destruction du Droit social des travailleurs.
