L’entrepreneuriat est devenu, en moins de 50 ans, un Graal universel, célébré par un concert de louanges médiatiques, politiques voire académiques, et affublé de pouvoirs puissants. En France, la « start-up nation » en est la forme actuelle, censée assurer la croissance, créer de l’emploi, favoriser l’innovation, mais aussi et par un amalgame discutable, réduire le chômage, lutter contre la pauvreté et, ce faisant, permettre l’inclusion des populations fragilisées.
Ainsi, les politiques publiques encouragent non seulement la création de firmes technologiquement innovantes, à fort potentiel de croissance et gourmandes en investissements, mais aussi une tout autre forme d’entrepreneuriat, qu’Alain Fayolle, professeur à l’EM Lyon Business School, décrit comme « la face cachée de l’entrepreneuriat » : ce sont les entrepreneurs par nécessité, « individus poussés à la création d’entreprise car ils ne perçoivent pas de meilleures alternatives d’emploi ».
Or, contraindre à entreprendre pour sortir de l’exclusion, est-ce une bonne idée ? Les pouvoirs publics, en France comme en Europe (voir vidéo ci-dessous) soutiennent l’entrepreneuriat dit « inclusif », comme outil d’insertion sociale et de résorption du chômage, mais quels impacts économique, social et individuel, ont ces politiques ? Sont-elles économiquement efficaces ? Humainement souhaitables ? Socialement soutenables ? Si oui, à quelles conditions ?
440 euros net par mois
En effet, les chiffres de l’entrepreneuriat en France décrivent une réalité en trompe-l’œil : certes, le nombre de créations d’entreprises bat chaque année des records historiques, à plus 17 % en 2018 pour 693 300 entreprises créées. Mais plus de 70 % de ces nouvelles entreprises ont été créées sous le statut d’entreprise individuelle ou de microentrepreneur. Or, les microentrepreneurs retirent en moyenne 440 euros net par mois de leur activité, un revenu 2,3 fois inférieur au seuil de pauvreté.

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