Note de la rédaction: Le constat est très bien établi, mais les propositions manquent, à notre avis, d'ambition. Pour émanciper réellement et une fois pour toute le travail, il ne suffira pas de donner un peu de pouvoir aux salariés dans l'entreprise, il faut les libérer de toute forme de chantage en leur donnant un statut assorti d'un salaire à vie et de la propriété d'usage (collective) des moyens de production.
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Comment a évolué l’organisation du travail depuis 20 ans ?
Le taylorisme, c’est-à-dire la séparation entre le travail de conception et le travail d’exécution, est constitutif de l’organisation du travail dans l’histoire du capitalisme, même si cela a été théorisé par Taylor lui-même seulement au début du XXe siècle. La révolution industrielle, déjà, s’est fondée sur l’expropriation du savoir des artisans et des ouvriers. L’idée selon laquelle il faut exproprier le savoir-faire des travailleurs et travailleuses pour que le capital puisse se développer traverse l’histoire du capitalisme. Mais elle a eu tendance à se radicaliser dans la période récente avec notamment le développement des technologies numériques, avec une standardisation du travail et un contrôle permanent de l’activité du travail. Auparavant, les travailleurs et travailleuses avaient des marges de manœuvre clandestines pour décider ensemble comment faire le travail en échappant au regard des petits chefs. Dans ce que j’appelle l’organisation néolibérale du travail, les technologies ont permis une radicalisation du diptyque « programmation-contrôle » : on programme le travail en détail et on le contrôle en détail.
Extraits
Cette soumission, cette perte d’autonomie dans le travail se traduit donc par une perte d’autonomie des individus dans la vie de la cité. On a donc à la fois une dégradation de la santé, une dégradation de la qualité de la démocratie et, par-dessus le marché, une dégradation de l’environnement. Car il faut bien voir que le consumérisme, c’est une compensation – et ce depuis longtemps.
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Le système scolaire est organisé de façon à produire cette résignation. Il y a beaucoup à dire sur la façon dont la pédagogie (ou plutôt la non-pédagogie), dans le système scolaire français en particulier, repose sur la coupure taylorienne entre le maître et les élèves, et fonctionne comme un instrument de conformation des individus à la hiérarchie. Pourquoi n’est-ce pas plus contesté ?
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La contradiction principale du capitalisme, disait déjà Castoriadis il y a 40 ans, c’est qu’il essaie d’éliminer le travail vivant – la mobilisation par les salarié.es de leur intelligence, de leur sensibilité, de leur empathie avec les autres et avec le monde – mais, en même temps, il en a absolument besoin. Le travail humain, l’intelligence humaine demeurent indispensables à la production et au profit. Le management essaie par tous les moyens d’éradiquer le travail vivant, avec toutes les conséquences que l’on voit sur la santé des gens, mais s’il y arrivait, cela serait une catastrophe pour le management lui-même !
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Certains responsables syndicaux ont pris conscience du caractère stratégique des questions de travail. Pour reprendre pied dans les ateliers et les bureaux, et pour redonner aux salarié.es le sentiment que se syndiquer est utile, des syndicats, en alliance avec des chercheurs et chercheuses, travaillent avec les salarié.es sur ces questions de la qualité du travail, du pouvoir d’agir dans le travail.

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