La réforme de l’assurance chômage entrera en vigueur à partir de novembre prochain. Elle modifie notamment les conditions d’accès à l’indemnisation — il faudra justifier 6 mois de travail sur 24 (contre 4 mois sur 28 à l’heure actuelle) — et introduit la dégressivité de l’indemnité pour les personnes ayant perçu plus de 4 500 euros brut par mois lorsqu’elles étaient en poste. Même la CFDT, habituellement conciliante avec le pouvoir, a fait part de son opposition.
En décembre, un décret signé en catimini avait déjà durci les sanctions contre les chômeurs. L’ensemble des droits sociaux sont concernés par ce détricotage de l’État-providence, comme nous l’expliquions en mai dernier. Il s’agit d’une entreprise idéologique, où l’important est de frapper fort et d’aller vite.
À chaque gouvernement ses remises en cause sociales. Prochaine étape : les retraites. La réforme prétend établir un régime universel, mais elle bouleverse la philosophie du système. Les salariés risquent de devoir choisir : partir à la retraite avec une faible pension ou rester en activité avec l’espoir de recevoir un peu plus. C’est déjà au nom de la justice que les lois travail ont été instaurées…
Avec la loi travail concoctée en 2016 par Mme Myriam El Khomri, les lois puis les ordonnances imposées par M. Emmanuel Macron (2016-2017), le recours aux conseils de prud’hommes, chargés de juger les litiges liés au travail, a encore baissé : 127 000 saisines en 2017, contre 187 651 en 2014. Et ce n’est pas, on s’en doute, parce que les conflits ont disparu. Plusieurs facteurs expliquent ce retrait.
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Conclusion de l'article
Enfin, la volonté de M. Macron de contourner le juge s’étoffe par le projet de réforme de la justice et sa dématérialisation par des algorithmes ad hoc (confidentiels). Le plaignant remplirait un formulaire à l’écran, et la décision lui serait notifiée sans qu’il accède au magistrat. De nombreuses sociétés se sont constituées pour créer un marché privé de la justice, qui se qualifient — novlangue anglophone obligatoire — de « start-up de la legaltech [technologie juridique] à l’Open Law [droit ouvert] (13) ». Ces « associations » souhaitent créer une base de données gigantesque constituée de tous les jugements rendus en France, avec éventuellement la mention des magistrats qui ont siégé, afin de modéliser, comme en économie, leurs comportements face à tel ou tel litige. Une forme de vampirisation privée des archives judiciaires nationales. Cela contrevient au « droit au juge (14) », qui comprend le droit à un procès équitable (article 6 de la convention européenne des droits de l’homme) impliquant le droit à l’égalité des armes et le droit à une protection juridictionnelle effective.
Ces atteintes au droit du travail et à la justice, censées développer l’emploi, contribuent à sa précarisation, tandis que la complexification de l’accès au juge en éloigne les classes populaires. Au mépris de la démocratie.
