top of page

Travail et émancipation


La centralité du thème des rapports entre travail et émancipation dans l’œuvre de Karl Marx a nourri et imprimé sa marque à la sociologie du travail. Mais la question de l’émancipation a ensuite été occultée jusqu’à une période récente, délaissée à la mesure de l’engourdissement de la critique. Quant aux recherches conduites dans une perspective de sociologie critique du travail, elles ont surtout cherché à mettre au jour les nouvelles formes d’aliénation et/ou d’exploitation, en oubliant de traiter de manière aussi systématique les pensées et pratiques de l’émancipation. La controverse « Travail et émancipation » propose de faire discuter des perspectives d’« émancipation laborale » qui, bien que toutes tournées vers une remise en cause de l’organisation capitaliste du travail, tracent des voies différentes pour y parvenir.

1. Antoine Artous (2003) a montré la centralité, dans l’œuvre de Karl Marx, du thème des rapports entre travail et émancipation. Ce thème a nourri et imprimé sa marque à la « première » sociologie du travail, dans le prolongement des analyses de Georges Friedmann et Pierre Naville. Mais la question de l’émancipation a ensuite été occultée jusqu’à une période récente, peut-être délaissée à la mesure de l’« engourdissement de la critique » observé, dès les années 1960, par Herbert Marcuse (1968). Quant aux recherches conduites dans une perspective de sociologie critique du travail, elles ont surtout cherché à identifier les nouvelles formes d’aliénation et/ou d’exploitation, en oubliant de traiter de manière aussi systématique les pensées et pratiques de l’émancipation.

2. Pourtant, depuis maintenant plus d’une décennie, la question et le concept de l’émancipation sont réinvestis à l’aune des mutations de la « société salariale ». Les nouvelles perspectives partagent l’acception marxienne pour qui l’émancipation est nécessairement l’acte par lequel des hommes libres selibèrent du pouvoir exercé par d’autres sur eux (Dardot & Laval, 2012). Elles renouent ainsi avec l’adresse inaugurale de l’Association internationale des travailleurs rédigée par Karl Marx : « l’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ». Aussi, doit-elle être pensée comme désaliénation, comme procès de réappropriation par les individus de leurs forces sociales aliénées. Elle passe, dans la vision marxienne, à la fois par une remise en cause de l’organisation capitaliste du travail et par une réduction massive du temps de travail (Artous, 2003). Il s’agit donc de libérer le travail et, simultanément, de se libérer du travail.

Pour lire la suite

#exploitation #Emancipation #Robotique #Progrès #Production

bottom of page