Compte-rendu de la réunion/atelier du jeudi 17 janvier qui s'est tenue au Lieu-dit, Paris 20ième (le débat a été filmé, la vidéo vous sera communiquée ultérieurement).
Le Mouvement des gilets jaunes parti d’un ras-le-bol fiscal, s’est rapidement cherché autour de listes de revendications (salaires, retraites, transports, conditions de vie, plus de 40) pour finalement se concentrer sur une revendication centrale : le Référendum d’Initiative Citoyenne ou RIC.
Beaucoup de ses révoltés ont découvert alors que le RIC peut être implémenté dans la Constitution selon des modalités qui peuvent le rendre efficace, inefficace ou même contre-productif.
Nous ferons le point sur son emploi et ses limites et les conditions d'un RIC utile pour donner le pouvoir au peuple.
L'idée de la réunion était de travailler par ateliers sur l'écriture des modalités du RIC, après une présentation par Wikicrate* des fondements du RIC sur laquelle l'association "ateliers constituants" a beaucoup travaillé.
Nous étions plus de 30, jeudi soir au Lieu-dit pour participer au débat. La réunion a commencé à 20h au lieu de 19h, du fait d’un changement de lieu tardif indépendant de notre volonté, et elle a duré jusqu’à minuit.
Wikicrate* a présenté les modalités du "Référendum d'Initiative Citoyenne en toute matière", qui peut être :
- législatif, pour créer ou modifier des lois
- abrogatoire, pour supprimer des lois, ou traité, ou décrets, etc
- révocatoire, pour révoquer des mandats d'élus
- constituant, pour modifier (et donc changer) la constitution
Dans la pratique, les initiatives citoyennes pourraient être examinées par des chambres référendaires, constituées de représentant de la population tirés au sort, avec pour mission d'étudier la proposition soumises en s'appuyant sur l'audition de défenseurs de la proposition, d'opposants, d'experts, etc. afin de rendre un avis sur l'opportunité ou non d'engager le référendum après un vote de la chambre. C'est pendant l'audition des citoyens à l'origine de l'initiative que le texte est éventuellement corrigé est amendé avec eux et des juristes de façon à pouvoir, en cas de succès, être formaté juridiquement.
Des "seuils" de majorité pourraient ainsi déterminer si le référendum doit ou non être lancé : On le lance si les membres de la chambre des référendums sont clivés avec une fourchette de 25 à 75% en faveur de l'initiative. On laisse tomber si moins de 25% mais on fait droit à l'initiative sans avoir besoin de référendum (sauf constituants) si plus de 75% approuvent l'initiative citoyenne. Les % sont indicatifs, mais l'idée est de donner un rôle de "filtre" aux chambres référendaires, pour ne pas se retrouver avec des référendums en trop grands nombres sur tout et n'importe quoi (le retour de la peine de mort par exemple). Par ailleurs, Wikicrate évoque le cas de l'Irlande parmi d'autres (Suisse), qui avait abrogé par référendum l'interdiction d'avorter alors que les élus au pouvoir, très conservateurs, y étaient opposés. Bref, avec une représentation suffisante en nombre et une indépendance à garantir (rémunération assuré, un seul mandat, pas de professionnalisation) on peut faire confiance à ces chambres référendaires.
Groupes de travail
Vers 21h30, nous nous sommes divisés en 6 groupes. Chaque groupe a choisi le thème qu’il voulait discuter et a désigné un gardien de temps, un rapporteur, et un facilitateur. Les interventions étaient limitées à 2 mn. A 23h15 nous avons procédé à la restitution des divers groupes. Le rapporteur de chaque groupe a résumé les débats de son groupe en 3 mn puis a répondu à quelques questions, le tout en 6/7 mn pour chaque groupe.
Thèmes choisis par les groupes : 1. La base et le haut. 2. Comment faire du RIC une réalité dans les institutions de la République ? 3. La transition entre la société actuelle et celle qu’on veut instaurer. 4. Est-il pertinent de constituer une chambre des référendums ? 5. Comment va-t-elle se constituer ? 6. comment on peut changer la constitution avec des RICs ?
Restitution des travaux des groupes
1. La base et le haut.
Le groupe insiste sur la nécessité, pour rester démocratique, de faire partir les initiatives citoyennes par le bas, c'est à dire à la plus petite échelle, puis de faire remonter à l'échelle supérieure si le sujet l'exige (quartier, commune, département, région, nation) avec, en cas de sujet à remonter d'une échelle, la désignation de représentant avec mandat impératif et unique.
Ainsi, le peuple ne délègue pas immédiatement ses prérogatives à représentant pour des questions d'échelle nationale, mais les questions franchissent à chaque fois les différentes échelles.
2. Comment faire du RIC une réalité dans les institutions de la République ?
Le RIC est l’outil de la transition. Il faut le diffuser (terrain, internet, débats, réseaux sociaux), l’expliquer pour que les gens ne se laissent pas avoir par les contre-propositions de Macron et qu’ils ne se démobilisent pas. Il faut aussi avoir un coup d'avance, et disposer de "notre RIC" déjà écrit pour éviter de se faire refiler des RIC qui n''en seraient pas vraiment.
Il faut faire de la revendication du RIC une idée fixe, un disque rayé : le RIC, le RIC. C’est plus rassembleur qu'un programme qui ne réunira jamais tout le monde et moins réductible qu'une mesurette isolée. Jouer sur l'humour, pour intéresser les indécis ou les "non concernés". Dédier un média sur le RIC, puis des medias pour garder la pluralité .
Il faut pousser toutes les luttes, ne pas cliver, et le RIC est ainsi un mot d'ordre dont on peut s'emparer quel que soit son moyen de lutte.
3. La transition entre la société actuelle et celle qu’on veut instaurer.
Instaurer un rapport de force : bloquer l’économie, la production mais surtout les flux (les ronds points et les péages comme les Gilets Jaunes). En ce qui concerne les forces de l’ordre, Il faut savoir qu’elles sont favorables aux Gilets jaunes mais que leur vie dépend de l’Etat. Comment résoudre leur dilemme ?
Oser les tentatives "institutionnelles" même si elles paraissent vaines : les procès contre l'Etat pour anti-constitutionnalité, les pétitions, voire les élus qui proposent des RIC.
qu'elles soient sur le terrrain (Gilets Jaunes, manifs, grève) ou "dans" les institutions (débats, élections, procès à l'Etat)
4. Est-il pertinent de constituer une chambre des référendums ?
Elaborer un projet affiné de méthodologie : Pour préparer un RIC, partir de la base (beaucoup de discussion garantit la cohésion et l’adhésion). Pour s’assurer de sa légalité/validité faut-il une chambre des référendums et si oui avec quel pouvoir, quels droits, constituée de quelle manière (tirage au sort ? représentants d’organes divers ? mandats courts pour éviter le professionnalisme en attendant le SAV qui résout ce pb), avec quel champ de compétence (experts?). Faut-il un seul et lequel ? Olivier Berruyer propose que chaque année on vote sur les 5 questions qui auront obtenu le plus grand nombre de signatures (du coup pas besoin de seuil).
5. Comment va-t-elle se constituer, cette chambre de référendums ?
Une chambre des référendums aurait 3 missions : Vérifier les signatures, vérifier la constitutionnalité, vérifier la modalité des décisions. Pour éviter les pressions (lobbys, médias), et la corruption, il faut sans doute garantir à la chambre : un certain isolement, la transparence (notamment l’enregistrement sans montage), un nombre suffisant de membres., si possible l'anonymat.
En synthèse,
Avoir un ou plusieurs projets de RIC prêts (pour ne pas se faire enfumer par une RIC sauce macron) qui auront été élaborés en maîtrisant le processus de rédaction.
Faire des RIC locaux puis remonter dans les échelons ; privilégier les échelles locales, sans vouloir uniquement un RIC national sur les grands sujets.
Respecter et encourager toutes les formes de luttes.
Faire du RIC une idée fixe, fédératrice et incontournable : obtenir le RIC, c'est obtenir la lampe du génie plutôt que de se contenter d'un vœu.
Un grand merci à Wikicrate* qui a animé le débat, à Pierre-Alain qui l’a filmé, et au Lieu-dit qui nous a accueillis.
(*)Wikicrate, 62 ans, électronicien, est investi dans l’ingénierie démocratique. Il est un des membres fondateurs en 2012 de l’association « Les Citoyens Constituants » dont il est porte-parole. Il a été un des premiers signataires de la pétition d’Article3 pour le RIC. Il est intervenu dans le M6R, dans #NuitDebout, a participé à des débats visibles sur Youtube sur l’assemblée constituante face à Alexis Corbières (France Insoumise) et à André Bellon (Association « Pour une Constituante »).
Pour voir le débat intégral, cliquer ici
Pour voir la vidéo courte cliquer sur l'image