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Le poète est un ouvrier


Pour le Centenaire de la révolution d'octobre 1917, nous vous offrons ce poème de Vladimir Maïakovski, sur la suggestion de Simone.

Le poète et dramaturge Vladimir Maïakovski (1893-1930) est une figure du futurisme russe. Il accompagna la révolution bolchevique avant d’être confronté au stalinisme. Il se suicida. (Monde Diplomatique. Août-septembre 2016)

Le Poète et l'ouvrier lu par Christine Fusarelli

Le poète est un ouvrier (1918)

On gueule au poète: » On voudrait t’y voir, toi, devant un tour ! C’est quoi, les vers ? Du verbiage ! Mais question travail, des clous ! » Peut-être bien en tout cas que le travail est ce qu’il y a de plus proche de notre activité. Moi aussi je suis une fabrique. Sans cheminée peut être mais sans cheminée c’est plus dur. Je sais, vous n’aimez pas les phrases creuses. Débiter du chêne, ça, c’est du travail. Mais nous ne sommes-nous pas aussi des menuisiers ? Nous façonnons le chêne de la tête humaine. Bien sûr, pêcher est chose respectable. Jeter ses filets et dans ses filets, attraper un esturgeon ! D’autant plus respectacle est le travail du poète qui pêche non pas des poissons mais des gens vivants. Dans la chaleur des hauts-fourneaux chauffer le métal incandescent c’est un énorme travail ! Mais qui pourrait nous traiter de fainéants ? Avec la râpe de la langue, nous polissons les cerveaux. Qui vaut le plus ? Le poète ou le technicien qui mène les gens vers les biens matériels ? Tous les deux. Les cœurs sont comme des moteurs, l’âme, un subtil moteur à explosion. Nous sommes égaux. camarades, dans la masse des travailleurs, prolétaires du corps et de l’esprit. Ensemble seulement nous pourrons embellir l’univers, le faire aller plus vite, grâce à nos marches. Contre les tempêtes verbales bâtissons une digue. Au boulot ! La tâche est neuve et vive. Au moulin les creux orateurs ! Au meunier ! Qu’avec l’eau de leurs discours ils fassent tourner les meules !


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